Dans un communiqué du 22 juillet, le ministère du Logement dresse un premier bilan de la mise en place des "APL en temps réel" (ou contemporanéisation des aides personnelles au logement). Après plusieurs reports, celle-ci, annoncée dès 2017, a finalement été mise en place au début de cette année (voir notre article du 7 janvier 2021). Depuis cette date, elle a fait l'objet de divers ajustements pour ne pas pénaliser les jeunes non-salariés, comme les apprentis ou les alternants (voir notre article du 15 mars 2021). Pour mémoire, la réforme consiste à calculer le droit et le montant des APL, non plus sur la base des revenus de l'année N-2 avec une actualisation annuelle, mais sur celle des 12 derniers mois de revenus, avec une actualisation tous les 3 mois. Le montant de l'APL versé au premier trimestre 2021 a donc été calculé sur la base des revenus de décembre 2019 à novembre 2020. Tous les autres paramètres des APL demeurent en revanche inchangés.

Une économie supérieure à celle escomptée dans le budget 2021

Si plusieurs associations, comme l'Unafo (Union professionnelle du logement accompagné) ou l'Unhaj (Union pour l'habitat des jeunes), ont déjà publié des bilans partiels (voir notre article du 15 mars 2021), celui du ministère est le premier à s'appuyer sur les chiffres de la Cnaf.
En termes de trésorerie, l'économie réalisée serait de 1,1 milliard d'euros selon les estimations de la Cnaf, un chiffre très proche de l'évaluation initiale qui était de 1,2 milliard lors des premières esquisses de la réforme. L'économie est en revanche nettement supérieure aux 750 millions d'euros d'économies pris en compte dans la loi de finances initiale pour 2021 (les APL sont versées par les CAF, mais financées par l'État), qui entendait tenir compte de possibles conséquences de la crise sanitaire sur l'activité en 2021. Selon le ministère, "la révision à la hausse de la prévision de l'impact de la réforme est directement liée au maintien des ressources des ménages du fait des mesures gouvernementales de soutien à l'économie et à l'emploi prises en 2020 et 2021".
Au final, la dépense budgétaire 2021 pour les APL devrait toutefois être quasiment identique à celle prévue en loi de finances, soit de l'ordre de 15,6 milliards. Cette situation, malgré une économie plus importante que programmée, s'explique par "le tendanciel de dépenses en matière d'APL, hors mise en œuvre de la réforme", qui se révèle "plus élevé que ce qui était anticipé lors de la préparation de la loi de finances 2021".

"Gagnants" et "perdants", vraiment ?

Le plus attendu dans ce premier bilan de la réforme réside cependant dans l'impact de la contemporanéisation des APL sur ses allocataires. Sur ce point, il est important de rappeler que la modification du montant des APL en début d'année ne date pas de la réforme, mais se produisait tous les ans sur la base des revenus N-2, faisant ainsi chaque année des "gagnants" et des "perdants". S'ils sont convenus, ces deux termes sont au demeurant parfaitement impropres, les "gagnants" étant en fait ceux qui ont vu leurs revenus diminuer et les "perdants" ceux qui les ont vu au contraire augmenter. Dans son bilan, le ministère explique qu'"au 1er janvier 2021, s'est ajouté l'effet spécifique de la réforme des APL en temps réel, sans modifier fondamentalement la proportion d'allocataires connaissant des évolutions".
Globalement, au 1er janvier 2021, 38,2% des allocataires ont ainsi vu leur niveau d'APL diminuer (contre 35,2% au 1er janvier 2020), avec un montant moyen de la baisse passé de 98 à 119 euros. À l'inverse, 25% des allocataires ont vu leur niveau d'APL augmenter à cette même date (contre 23,8% au 1er janvier 2020), avec un montant moyen de la hausse passé de 62 à 57 euros. Cette augmentation simultanée du nombre de "perdants" et de "gagnants" se traduit par une diminution du nombre de ceux qui ont vu leur APL inchangée (36,8% contre 41% un an plus tôt).

La hausse du nombre de "perdants" de la réforme est plutôt une bonne nouvelle

Si on considère uniquement l'effet spécifique de la réforme des APL en temps réel, le bilan est différent : 52,2% des allocataires ont vu le montant de leur prestation inchangée, 29,6% ont vu leur APL diminuer (pour un montant moyen de 73 euros), tandis que 18,2% ont bénéficié d'une hausse de leur APL (pour un montant moyen de 49 euros). Parmi ces derniers, environ 115.000 allocataires n'auraient pas bénéficié d'APL en 2021 sans la réforme (mais en aurait bénéficié en 2022, avec un an de décalage). Le ministère rappelle en outre que "les personnes en formation bénéficient d'un traitement particulier". C'est le cas des étudiants (dont les ressources sont prise en compte sur la base d'un forfait), des apprentis (grâce à un abattement sur leurs ressources) et des titulaires d'un contrat de professionnalisation (qui bénéficieront de l'entrée en vigueur d'un abattement en septembre, avec effet rétroactif). 
Enfin, le ministère du Logement rappelle que "la réforme des APL en temps réel ne modifiant pas le barème de calcul des aides au logement, toute évolution du niveau d'APL versé est liée à une évolution de revenus". Autrement dit, le fait que le nombre des "perdants" est plus important que celui des "gagnants" traduit en fait une amélioration d'ensemble des revenus en 2020 et un maintien de l'accès à l'emploi malgré la crise sanitaire ((les étudiants ou les chômeurs qui trouvent ou retrouvent un emploi voyant leurs revenus augmenter et donc leur APL diminuer). On rappellera enfin que les "perdants" de la réforme se seraient vus, dans le système antérieur, réclamer le reversement des trop-perçus après ajustement de leurs ressources.

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