En 2006, les associations d'élus (AMF, ADF et ARF) se présentaient unies lors du Congrès de l'Association des maires de France pour présenter leurs propositions de réforme de la fiscalité locale. Ambiance constructive. En 2007, le président de la République se déclarait favorable à un Grenelle de la fiscalité locale. Ambiance studieuse. Pour 2008, l'ambiance est... différente. Il faut dire que le ministre du Budget, Eric Woerth, s'est plié à un exercice risqué : il a participé à la séance plénière et a répondu aux nombreuses interrogations des élus locaux et des orateurs. Et si l'on sent, comme les années précédentes, une réelle difficulté à s'entendre sur les données chiffrées du budget de l'Etat et sur leur impact sur les ressources fiscales des communes, il y a sans conteste un contexte aujourd'hui très différent : la crise économique.
Les collectivités, qui assurent 75% des investissements publics, se trouvent désormais en première ligne. "Nous avons la certitude que sans l'action des collectivités territoriales, la crise ne sera pas surmontée, a déclaré le président de la commission des finances de l'AMF et maire de Sceaux, Philippe Laurent, mais pourront-elles continuer à soutenir l'économie nationale ? En auront-elles les moyens ?" Gilles Carrez, rapporteur à la commission des finances de l'Assemblée nationale et président du Comité des finances locales, appelle les communes à la rescousse : "Nous avons une responsabilité majeure car nous réalisons les trois quarts des investissements. Nous avons petite marge de manoeuvre avec l'emprunt pour investir dans le BTP." Mais, pour les maires, très nombreux à prendre la parole dans la salle de l'auditorium, les comptes n'y sont pas! Ils ont besoin du soutien de l'Etat pour financer leurs dépenses d'investissement mais aussi leurs dépenses de fonctionnement, prévoyant, avec la crise économique, une montée en puissance des dépenses sociales dans les mois qui viennent.

Réforme du FCTVA : un frein à l'investissement

Le président de la République devrait annoncer dans les jours qui viennent un plan de relance de l'économie. "Pourquoi pas ?, répondent les collectivités locales, mais il est nécessaire, vu notre poids de nous y associer." Et puis se pose une contrariété de taille qui, pour les élus, ne peut être effacée : celle de l'intégration du FCTVA dans les dotations de l'Etat aux collectivités. Sur ce point, Eric Woerth, qui a réaffirmé que le FCTVA était un remboursement, a été un peu bousculé par les orateurs et les congressistes. Au-delà d'une question de dénomination - remboursement ou dotation -, il y a de fait un effet mécanique qui pénalise les investissements locaux. Le FCTVA et les dotations étant regroupés dans une enveloppe dont l'augmentation est limitée à l'inflation, si le premier, c'et-à-dire le FCTVA, augmente, les secondes, c'est-à-dire les dotations, diminuent puisque l'ensemble ne doit pas bouger (ou presque). Logique ! Le problème c'est que le FCTVA a vocation à rembourser la TVA acquitée par les collectivités sur leurs investissements. André Laignel, secrétaire général de l'AMF, qui a expliqué ce mécanisme, a qualifié la réforme du FCTVA, "de prime au désinvestissement". Eric Woerth s'est voulu conciliant, reconnaissant que si l'on ne prend pas en compte la croissance attendue du FCTVA, l'augmentation de l'enveloppe globale est de 0,6% et non de 2%.

De la TP à la réforme globale de la fiscalité ?

Le ministre du Budget s'est voulu constructif en précisant que le plan de relance de l'économie prévoira des mesures incitatives permettant de faciliter l'investissement des collectivités territoriale : réforme du Code des marchés, réforme de l'urbanisme... et, comme depuis de nombreuses années quand le dialogue mène à une impasse, le sujet qui reprend des couleurs est... la réforme de la fiscalité locale. "La vraie question est celle de la réforme fiscale, ou comment faire progresser la fiscalité locale vers plus d'autonomie", a lancé Eric Woerth. Le président de la commission des finances de l'AMF a rappelé que les élus attendaient depuis février dernier des réponses à leurs propositions de réforme. "La réforme annoncée de la TP est le prélude à une réforme d'envergure de la fiscalité locale", a lancé Gilles Carrez. Maxime Camuzat, maire de Saint-Germain-du-Puy (Cher), déclarait déjà au Congrès AMF de 2006 : "La fiscalité doit s'adapter aux évolutions des activités génératrices de richesses". Cette année, il poursuit sa démonstration en demandant que "la taxe professionnelle soit remplacée par un nouvel impôt qui prenne en compte l'évolution de l'économie en taxant notamment les actifs financiers car l'activité économique est désormais faite de flux : elle n'est plus territorialisée sur une commune. C'est à l'Etat de jouer son rôle en répartissant cette nouvelle ressource."
Le fait que les collectivités soient des acteurs incontournables pour lutter contre la récession serait-il une occasion pour les associations d'élus d'obtenir, enfin, leur réforme de la fiscalité locale ? Eric Woerth se dit prêt à poursuivre le débat mais déclare : "Ce n'est pas simple de discuter avec les collectivités territoriales qui sont si différentes les unes des autres : qui les représente ?"

Clémence Villedieu

La DGFIP communique au Congrès AMF

Eric Woerth a profité de la tribune du Congrès AMF pour faire un point sur la réforme de ses services : après la création de la direction générale des finances publiques (DGFIP) issue de la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, le ministre du Budget a mis en place un groupe de travail pour enrichir l'offre de conseil fiscal aux élus locaux. Eric Woerth précise que les bases des impôts locaux seront communiquées plus tôt. Le projet de loi de finances rectificative annonce déjà des amélioration en matière d'information aux collectivités. De plus, la dématérialisation complète de la chaîne budgétaire et comptable sera proposée gratuitement à toutes les collectivités territoriales et une simplification du paiement des services des usagers locaux (crèches, cantines...) sera expérimentée par carte bancaire sur internet.

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