A l'occasion de leur point presse mensuel, le 21 octobre, le président et le directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) ont présenté un premier bilan de l'accord conclu en 2009 entre les représentants des infirmiers libéraux et l'Assurance maladie (voir nos articles ci-contre). Pour la première fois, un accord remettait en cause le principe de la liberté d'installation des professions de santé en prévoyant de geler le nombre d'infirmiers libéraux dans 250 bassins de vie considérés comme surdotés ou très surdotés (dans lesquels une installation suppose désormais de remplacer un infirmier partant). A l'inverse, dans 250 zones sous-dotées ou très sous-dotées, les infirmiers qui acceptent de s'installer bénéficient d'une prise en charge de leurs cotisations d'allocations familiales et d'une aide à l'investissement de 3.000 euros par an (ces aides pouvant se combiner avec celles consenties par les collectivités). Les zones sous ou surdotées représentent environ 20% du territoire, les 80% restant n'étant pas concernées par ce mécanisme. En contrepartie de cet accord, l'ensemble des infirmiers ont vu leurs actes revalorisés de près de 6%.
Cet accord, signé après de longues négociations, semble bien porter ses fruits. Compte tenu du délai très court écoulé depuis sa signature, l'impact de ce dispositif expérimental - l'avenant à la convention étant conclu pour deux ans - apparaît même très important. Selon le dossier présenté par la Cnam, sur la période avril 2009-janvier 2010 (soit dix mois), les effectifs d'infirmiers installés en zones très sous-dotées ont en effet augmenté de 11%, contre une moyenne nationale de +2,4%. Ce taux a ainsi presque doublé par rapport à celui constaté l'année précédente (+6% en 2008). A l'inverse, le nombre d'infirmiers libéraux en zones surdotées a diminué de 3% sur la même période (contre +5% en 2008). Tout en reconnaissant que l'impact global du dispositif est encore limité compte tenu du nombre restreint de zones concernées, la Cnam en conclut que l'accord conventionnel "a ainsi permis d'attirer les professionnels là où les besoins sont les plus importants et d'éviter de nouvelles installations dans les zones où l'offre de soins est la plus dense". Elle entend donc s'atteler dès maintenant "à pérenniser le dispositif mis en place et à envisager, avec les représentants de la profession infirmière, son évolution". Pour l'Assurance maladie, il s'agit très clairement d'"intensifier la dynamique initiée".
Du côté des infirmiers libéraux, la tonalité est un peu différente, sans être pour autant négative. La Fédération nationale des infirmiers (FNI) - l'une des quatre organisations signataires de l'accord - indique ainsi dans un communiqué qu'elle ne conteste pas les chiffres avancés. Mais elle estime que "pour autant, la présentation résolument positive que fait l'Assurance maladie de ce bilan d'étape ne doit pas laisser à penser qu'en ce qui concerne la FNI, la pérennité de ce modèle serait acquise". La FNI indique en particulier qu'à ce stade, elle entend mettre des conditions à un éventuel renforcement du dispositif. Les négociations avec l'Assurance maladie s'annoncent donc serrées, même si le paysage semble plus dégagé que lors de la discussion de l'avenant initial.
Si les bons résultats observés se confirment sur le moyen terme, l'efficacité de cet accord pourrait donner des idées aux pouvoirs publics et à l'Assurance maladie. Un accord similaire a d'ores et déjà été conclu avec les kinésithérapeutes (voir notre article ci-contre du 23 septembre 2009). Et la question pourrait un jour être mise sur la table pour les médecins. Il reste toutefois à surmonter l'obstacle du coût d'un tel accord (les 6% de revalorisation pour tous les infirmiers libéraux) à un moment où les comptes de la sécurité sociale affichent des déficits encore jamais atteints.

Jean-Noël Escudié / PCA
 

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