La réforme à venir de la PAC ne constituera qu'une étape, estime le Conseil économique et social et environnemental (Cese). Dans un avis adopté le 25 mai, le conseil appelle à des changements profonds et regrette la décision en 1994 de soumettre les produits agricoles aux règles de l'OMC. L'objectif à terme : faire en sorte que les agriculteurs vivent du produit de leur travail et non des subventions, souligne le rapporteur du Cese, Régis Hochart, ancien porte-parole de la Confédération paysanne. Son avis, le premier de la nouvelle mandature du Cese, qui sera transmis au Conseil économique social européen ainsi qu'à la Commission, formule une série de propositions pour amorcer le changement. Tout d'abord, lutter contre la volatilité des prix exacerbée depuis 2007, en reconstituant des stocks stratégiques tampons, en facilitant le regroupement des agriculteurs, en instituant de grandes régions de production...

Maintenir les petites exploitations

Deuxième priorité : l'emploi. Alors que la population agricole française ne cesse de décroître, le rapporteur plaide pour "le maintien voire l’augmentation de l’emploi en agriculture". Il rappelle que depuis 20 ans aux Etats-Unis l'emploi agricole a cessé de décroître et que le prochain "Farm Bill" se donne pour objectif la création de 100.000 exploitations supplémentaires. "De nombreux jeunes souhaitent s’investir dans l’agriculture, mais l’importance du capital des exploitations à reprendre est devenue un frein à leur installation", constate le rapporteur, alors que la moitié des agriculteurs européens ont plus de 55 ans. Si l'épineuse question du foncier n'est pas de la compétence européenne, d'autres leviers sont à la disposition de l'UE. Régis Hochart préconise la création d'un observatoire européen de l'emploi agricole ainsi que la mise en place d’une conditionnalité sociale sur les paiements de la PAC qui tiendrait compte des conditions de travail et de formation. Dans le prolongement du bilan de santé à mi-parcours de 2008 et de la communication de la Commission du 18 novembre 2010, le Cese réclame une réorientation des aides afin qu'elles correspondent davantage au travail effectué qu'au volume de production. Afin de faciliter le maintien des petites exploitations, il préconise ainsi une aide forfaitaire, découplée de la production et attribuée en fonction du nombre d'employés (avec un maximum de 6 équivalents temps plein).
S'agissant des soutiens directs à l’hectare (droits à paiement unique), ils devront faire l’objet d’une nouvelle répartition après l’abandon programmé des références historiques (ce mode de calcul déjà abandonné par de nombreux pays tient compte des aides touchées au début des années 2000). Pourraient alors être mis en place d'autres types de références, notamment régionales avec des aides plus importantes aux régions les moins fertiles et économiquement les plus fragiles. Le rapporteur se félicite de l'orientation de la Commission vers une "agroécologie" et un "verdissement" des aides du premier pilier de la PAC. Un verdissement qui devrait "justifier au moins 15% des paiements directs en 2014 et augmenter graduellement d’ici à 2020".

Relocalisation

Le Cese soutient plus généralement l'idée d'une relocalisation de l'agriculture. "La volonté d’asseoir une agriculture et une alimentation plus territorialisées doit aboutir à optimiser la productivité territoriale plutôt qu’à rechercher la compétitivité internationale", estime le rapporteur qui entend "faire vivre les territoires". Il recommande de promouvoir les "circuits courts". Un travail qui implique l'ensemble des acteurs économiques et sociaux du territoire mais aussi les collectivités qui ont un rôle à jouer en termes d'attractivité. Le développement des circuits courts "suppose l’existence de services publics et de santé, de garde de petite enfance, de services aux personnes, d’activités culturelles et de loisir, qui rendent ces territoires vivants pour ceux qui y sont installés", souligne Régis Hochart.
Par ailleurs, les petits producteurs sont invités à participer à des actions collectives liées aux indications géographiques et aux signes de qualités (AOP-STG). Ces exploitations "pourraient alors accéder collectivement à des marchés qui leur échappent aujourd’hui".
Le rapport demande qu'une part plus importante de la PAC soit consacrée au développement rural. Il veut plus de cohérence entre le Feader et les autres fonds européens (FSE et Feder) et nationaux, comme le Fisac. Il estime aussi que les crédits du second pilier pour le développement des territoires ruraux ne doivent "en aucun cas être utilisés pour la création d’infrastructures lourdes", qui sont du rôle de la politique de cohésion, "mais bien pour améliorer la "vivabilité" quotidienne sociale, économique et culturelle des territoires ruraux".
Enfin, le Cese s'intéresse à la capacité de décision des territoires et demande une responsabilité plus grande des régions dans la mise en oeuvre des dispositifs régionaux du second pilier, tout en respectant les orientations nationales. Le Cese souhaite ainsi qu’une réflexion soit engagée sur l’intérêt de transférer l’autorité de gestion des fonds du Feader aux régions.

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