Fin des sorties sèches de l'Aide sociale à l'enfance à 18 ans, interdiction de l'accueil des mineurs à l'hôtel... Le Sénat a adopté dans la nuit du 15 au 16 décembre le projet de loi "relatif à la protection des enfants", ouvrant la voie à son adoption définitive début 2022. Députés – qui avaient adopté le texte à l'unanimité en première lecture en juillet, après l'avoir enrichi (lire notre article du 9 juillet) – et sénateurs se retrouveront le 11 janvier pour tenter de trouver un accord sur une version commune du texte en commission mixte paritaire (CMP).  Pour le secrétaire d'État chargé de l'enfance, Adrien Taquet, ce texte vise tout d'abord à améliorer la sécurité des enfants, qu'elle soit affective, matérielle ou physique".

Dans l'hémicycle du Sénat, plusieurs dispositions ont été étoffées ou clarifiées.

S'agissant des jeunes majeurs, le Sénat a voté un amendement du gouvernement pour "en finir avec le couperet des 18 ans". Il s'agit, a indiqué le secrétaire d'État, d'"étendre de façon systématique l'accompagnement des jeunes de 18 à 21 ans" passés par l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Il prévoit notamment "un accès automatique" au contrat d'engagement jeune qui prendra à partir de mars 2022 le relais de la Garantie jeunes. Le rapporteur du texte au Sénat, Bernard Bonne (LR), a salué "une avancée importante". Concernant le financement, Adrien Taquet s'est engagé dans un premier temps "à ce que l'État accompagne les départements à hauteur de 50 millions d'euros pour mettre en place ce dispositif". Les sénateurs ont en outre explicitement inscrit le principe d'un "droit au retour" à l'ASE jusqu'à 21 ans. Ces "avancées" ont été saluées par le collectif d'associations de protection de l'enfance Cause Majeur!, qui promet toutefois de rester "très vigilant quant aux conditions d'applications réelles".

Autre mesure phare, l'interdiction d'hébergement des mineurs protégés dans des hôtels. Les sénateurs ont prévu une interdiction totale, avec le soutien du gouvernement. Elle serait applicable dans un délai de deux ans. Les députés avaient gardé la possibilité d'y recourir "à titre exceptionnel", afin de répondre à des situations d'urgence. "Entre 7.500 et 10.000 mineurs protégés y sont hébergés aujourd'hui", a souligné Bernard Bonne.

Parmi les autres dispositions majeures, le fait que soit systématiquement recherchée la possibilité de confier l'enfant à un membre de sa famille ou un "tiers digne de confiance", ainsi que le principe de prévoir la prise en charge des fratries dans un même lieu d'accueil.

Le Sénat a également approuvé un amendement gouvernemental qui clarifie les dispositions visant au contrôle des antécédents judiciaires des intervenants en protection de l'enfance, notamment en matière d'infractions sexuelles.

Les sénateurs avaient par ailleurs approuvé, dès l'examen en commission, une revalorisation de la rémunération des 40.000 assistants familiaux et insisté sur le fait que ceux-ci devraient être associés "effectivement" au suivi de l'enfant. La pratique des week-ends "de répit" pour ces assistants familiaux devra être renforcée.

Le Sénat a encore approuvé des amendements du gouvernement pour inscrire "le principe de l'audition systématique" par le juge du mineur. Et pour que "soit systématiquement proposés à chaque jeune le bénéfice d'un parrainage" par des bénévoles ainsi qu'"un mentor" au moment de son entrée au collège.

En matière de gouvernance, les sénateurs ont introduit, à titre expérimental, la création, pour les départements qui le souhaitent, d'un comité départemental pour la protection de l'enfance, instance de coordination coprésidée par le président du département et par le préfet. Favorable à cette initiative, le ministre a plaidé pour raccourcir la période d'expérimentation de cinq à deux ans afin de la généraliser plus rapidement. Les sénateurs ont en outre souhaité "encourager le développement des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens au sein des établissements et services de l'ASE".

Une autre disposition concernant les mineurs étrangers isolés (MNA) a été combattue en vain par la gauche : le recours obligatoire au fichier national AEM (appui à l'évaluation de la minorité), afin de mieux repérer les jeunes étrangers ayant déposé des demandes de protection dans plusieurs départements.

Le texte a été votée à main levée, sans les voix de la gauche qui s'est abstenue, malgré des mesures "positives", notamment en raison de l'adoption de cet article sur les MNA, "un intrus dans cette loi", selon l'écologiste Raymonde Poncet Monge. À droite, René-Paul Savary (LR) a soulevé la question du coût pour les départements et du financement par l'État. "Il faudra voir si le compte y est", a-t-il dit.

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