Au 1er septembre 2021, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) dénombrait 28.821 nouveaux sites 5G, un chiffre atteint en à peine un an, à comparer aux 54.605 sites 4G d’ores et déjà autorisés par l’agence. Au-delà d’une indication sur la couverture géographique des technologies mobiles, ces chiffres représentent aussi de potentielles recettes fiscales pour les collectivités. Tout du moins jusqu’à aujourd’hui puisque l’Ifer (pour imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux) est dans la ligne de mire de Bercy, au grand dam des associations d’élus (ADF, ADCF, AMF, AMRF, APVF, France urbaine) qui, comme nous l'avons signalé dans notre édition du 13 septembre, viennent de publier un communiqué commun pour dénoncer "une nouvelle réduction des ressources locales".

Un produit porté par la 5G

On rappellera que l’Ifer a été créé par la loi de finances 2010 pour compenser la perte de recettes des collectivités induite par la suppression de la taxe professionnelle. Souvent associé aux antennes relais, c’est en réalité un impôt qui concerne une dizaine d’équipements allant des éoliennes au matériel ferroviaire en passant par les centrales électriques et photovoltaïques. L’Ifer radio, assis sur les antennes de téléphonie mobile (1.674 € par station en 2019), est cependant le plus dynamique. Porté par le New Deal mobile - qui aboutit souvent à créer de nouveaux sites radio - et le déploiement de la 5G, son produit a ainsi doublé en 10 ans pour atteindre 222 millions d’euros. 

Un impôt illisible et contre-productif ?

À l’origine de la bronca des élus, une étude commandée à l’inspection générale des finances (IGF) par l’Assemblée nationale en 2019 à la suite d’un amendement du député Éric Bothorel (LRM). Le député des Côtes-d’Armor déplorait une imposition "devenue illisible et contre-productive" susceptible de nuire au déploiement de la 5G. Un constat largement partagé par les opérateurs mobiles qui ne ratent jamais une occasion de dénoncer un impôt censé être nuisible à l’aménagement numérique du territoire. Le rapport de l’IGF, non publié mais dont les conclusions ont largement fuité (voir ci-dessous), cherche moins à supprimer la taxe qu’à en limiter la progression. Sous l’impulsion de la 5G et de la fin des exonérations du New Deal mobile, son produit pourrait en effet quasi doubler pour atteindre 400 millions d’euros en 2025.

Un rabotage inacceptable pour les élus

Or cette dynamique choque Bercy. Pour les associations d’élus, en revanche, "considérer que l’évolution favorable d’une recette fiscale perçue par les collectivités justifie son rabotage n’est pas acceptable". Les élus nient également tout impact de l’Ifer sur la situation économique des opérateurs tout comme sur l’aménagement numérique du territoire : "Le rapport démontre bien que les allègements fiscaux déjà en vigueur dans les territoires peu denses sont sans effet sur l’installation d’antennes." Et de suggérer que si l’ambition de l’État est bien d’atténuer la pression fiscale sur les opérateurs, il pourrait s’attaquer à la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques, un impôt assis sur les abonnements télécoms créé pour compenser la suppression de la redevance audiovisuelle.

Le sort donné à la réforme de l’Ifer est désormais entre les mains des parlementaires qui s’apprêtent à discuter le projet de loi de finances pour 2022.
 

  • Les pistes de l’IGF pour réformer l’Ifer

Le rapport de l’IGF – largement évoqué dans cette question du sénateur Hervé Maurey (UC) - déplore "la complexité" d’un impôt maintes fois réformé, notamment pour créer des exonérations sur les zones blanches. Il pointe également le caractère inéquitable de la redistribution du produit puisque "5% des collectivités territoriales les plus denses perçoivent un tiers du produit de l'Ifer quand les communes peu et très peu denses – qui représentent 80 % des collectivités percevant l'Ifer – ne reçoivent que 41% du produit total et des montants individuels peu élevés".

Trois pistes sont évoquées par l’IGF pour réformer l’Ifer :
• Une imposition par pylône et non par technologie qui permettrait de limiter son impact sur la 5G tout en simplifiant les déclarations des opérateurs. Le scenario handicaperait cependant Free qui possède le moins de sites.
• Un plafonnement de l’Ifer radio avec un mécanisme d’ajustement à la baisse du tarif en cas de dépassement d’un certain niveau de produit global. Une option assortie d’une suppression des exonérations ou tarifs réduits liés aux zones blanches ou de montagne. Elle est jugée favorable à l’aménagement numérique du territoire et défendue par Patrick Chaize, le président de l’Avicca.
• Enfin, un changement radical d’assiette. L’Ifer serait déconnecté de la couverture réseau pour concerner le chiffre d’affaires des opérateurs.

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