Les membres du gouvernement ont fait leur rentrée, vendredi 24 août, sur fond de morosité climatique et économique. François Fillon a présenté en Conseil des ministres le plan de travail des mois à venir. Un programme très chargé : dès le 18 septembre, le Parlement réuni en session extraordinaire examinera une série de projets de lois sur l'immigration, l'équipage des navires ou la contrefaçon. Parallèlement, le Conseil des ministres se penchera "prochainement" sur quatre autres projets sur la corruption, la carte nationale d'identité, le statut de la Polynésie et sur le parc naturel régional de Camargue qui fait l'objet d'un imbroglio juridique depuis le début de l'année. Mais les gros chantiers restent à venir. Social, économie, environnement ou encore politique publiques et prélèvements obligatoires : le Premier ministre en a énuméré pas moins de sept. Dans un contexte de crise boursière et de croissance en berne (0,3% au second trimestre 2007), la compétitivité des entreprises est au centre des préoccupations du gouvernement. La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, reste confiante. Lors d'un point presse organisé à l'issue du conseil, elle a présenté une série de mesures "structurelles" destinées à doper l'investissement des entreprises. "La France d'aujourd'hui investit dans la France de demain", a-t-elle martelé.

Simplification du crédit impôt recherche

Première étape : relancer l'innovation. Le crédit impôt recherche, très complexe à mettre en oeuvre, sera simplifié et amélioré.
Le nouveau dispositif prévoit un crédit d'impôt de 30% des investissements de recherche pour tous les investissements en deçà de 100 millions d'euros et de 5% au-delà. Pour inciter les entreprises, le taux sera porté à 50% l'année d'entrée dans le dispositif. La totalité des dépenses de recherche et développement se trouvera ainsi éligible. Les délais seront ramenés de six à trois mois. Cette mesure chiffrée à 2,7 milliards d'euros figurera dans le projet de loi de finances 2008. Elle sera accompagnée de la fusion, dès 2008, d'Oséo et de l'Agence de l'innovation industrielle (A2I), deux des principaux organismes de financement des entreprises. L'opération vise à mieux cibler les aides aux PME et à augmenter les crédits, alors que le soutien de la France aux entreprises est à un faible niveau par rapport aux autres pays européens. En revanche, il n'est pour l'heure pas question du Small Business Act, annonce phare de la déclaration de politique générale du Premier ministre en matière de commande publique.

Refonte de la formation professionnelle

L'un des engagements de la campagne présidentielle, ramener le taux de chômage à 5%, passera notamment par une refonte de la formation professionnelle, vivement critiquée ces derniers temps, notamment par un rapport sénatorial. Ce sera l'un des grands chantiers de Christine Lagarde pour 2008. Alors que la négociation sociale a démarré et doit aboutir d'ici à la fin de l'année, plusieurs pistes se dessinent déjà. L'idée d'un compte emploi formation fait son chemin. S'inspirant du rapport sénatorial, l'idée serait de permettre au salarié d'emporter ses droits à la formation en cas de changement d'entreprise. Le gouvernement souhaite également renforcer la mise en concurrence des organismes de formation amorcée avec la décentralisation de l'Afpa (Association pour la formation professionnelle des adultes). Dès 2009, les régions pourront ainsi choisir l'opérateur de leur choix. Le rapprochement entre l'ANPE et l'Unedic, quant à lui, "sera enclenché sans attendre", a indiqué le Premier ministre, lors du conseil.

Cinquième branche de la protection sociale

Comme l'avait également annoncé Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle, une cinquième branche de la protection sociale va être créée pour prendre en charge la dépendance. Si cette réforme fait l'objet d'un large consensus auprès des professionnels du secteur, aucune réponse n'a été donné à la question sur la place des départements qui gèrent et financent, avec l'APA et la PCH, les deux principales prestations de prise en charge de la dépendance. Comment concilier la nécessaire uniformisation d'une branche nationale de la protection sociale et le principe de la libre administration des collectivités ?

Grenelle de l'environnement

Troisième grand volet, après l'économie et le social : l'environnement, avec la préparation du Grenelle pour fin octobre. Associations, patronat, collectivités locales, syndicats, représentants de l'Etat ou de la société civile devront se mettre d'accord une quinzaine de mesures concrètes en faveur du développement durable. Six groupes de travail (climat et énergie, biodiversité, environnement et santé, démocratie écologique, production et consommation durables, emploi et compétitivité) ont été mis sur pied en juillet et devront remettre leurs conclusions fin septembre avant une consultation publique.

La révision générale des politiques publiques

François Fillon avait présenté le 10 juillet dernier la révision générale des politiques publiques. "Vaste chantier de modernisation", la réforme devrait permettre "d'identifier des marges d'amélioration de l'action publique en termes d'efficience, d'efficacité et de qualité de service". Quatre chantiers transversaux dont un sur les relations entre l'Etat et les collectivités locales ont déjà  été  lancés. C'est sans doute dans ce cadre que les débats sur les finances publiques annoncés dès septembre avec la réunion de la conférence nationale des exécutifs locaux, devraient avoir lieu. Dans sa communication du 24 août, le Premier ministre envisage aussi une révision des prélèvements obligatoires, une réflexion sur la fonction publique et un chantier sur le métier des enseignants.

Refonte de la carte judiciaire

Le Premier ministre a confirmé une refonte de la carte judiciaire annoncée en juin dernier par la ministre de la Justice, Rachida Dati. Tout en promettant la concertation et une application progressive de la réforme, la garde des Sceaux  avait annoncé que cette réforme imposait la suppression de certaines des juridictions existantes. Un "comité consultatif", installé fin juin, devrait se réunir à nouveau à l'automne après des consultations locales menées en parallèle par les chefs de cour d'appel et les procureurs généraux. Si la réforme devait être conforme au programme UMP de la campagne présidentielle, elle consisterait à adapter le nombre de cours d'appel à celui des régions administratives et à ne maintenir qu'un TGI par département. La Fédération des maires de villes moyennes (FMVM) et l'Association des petites villes de France ont demandé en juin dernier à être associées à la concertation.

Plan en faveur des banlieues

Le 3 juillet, à l'occasion de sa déclaration de politique générale, François Fillon précisait que ce plan, qui devra d'abord "désenclaver" les quartiers difficiles, impliquera entre autres "la réduction du nombre d'élèves dans les établissements où se concentrent les difficultés, avec un renforcement du tutorat" et la poursuite des "internats de réussite éducative". Christine Boutin, ministre du Logement, avait précisé, en début d'été, que le plan "Respect et égalité des chances" serait global : il devrait inclure des mesures concernant à la fois le développement économique et l'éducation.
Enfin le gouvernement s'attèlera à la préparation de la présidence française de l'Union européenne et à la révision de la Constitution. Voilà pour les annonces. Reste maintenant à les mettre en oeuvre avec des syndicats qui, eux aussi, s'apprêtent à faire leur rentrée.

Clémence Villedieu et Michel Tendil

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