« À Loos-en-Gohelle, la transition vers l’avenir n’est pas seulement une question de financement ou de technique. Pour que ce changement soit désirable, il doit être intelligible par les habitants », explique Antoine Raynaud, directeur de cabinet du maire de Loos-en-Gohelle. Cette commune, qui expérimente tous azimuts depuis plusieurs décennies, a développé une expertise sur les questions d'implication de la population. Une approche qui a déjà donné des résultats très positifs.
Maire depuis 2001, Jean-François Caron a laissé, en mars 2023, son fauteuil à son suppléant, Geoffrey Mathon. Le nouveau maire poursuit la démarche engagée, notamment celle qui consiste à s’appuyer sur la mise en récit des démarches citoyennes pour stimuler l’envie d'agir des habitants. Il s’agit de créer une dynamique locale, grâce à la puissance de l'imaginaire. L’approche narrative peut être mobilisée par différents outils, dont le plus emblématique est le « Ch’ti TAIDx », pour Territoire d’apprentissage et d’innovation démocratique. Il vise à proposer aux habitants qui ont monté un projet d’intérêt général avec la mairie de raconter cette expérience et leur engagement devant un public. Par exemple, lors des festivités Faîtes-in-Loos, Audrey, habitante de Loos-en-Gohelle, a relaté comment elle a convaincu la mairie de l’aider à créer une maison d’assistantes maternelles (MAM). Mig, autre habitant auteur de bande dessinée, lassé de voir les chemins communaux salis par les déchets chaque fois qu’il sortait prendre l’air, explique comment il a monté une brigade de nettoyage, en lien avec la mairie, pour que son bol d’air quotidien ne se fasse plus au milieu des poubelles. Ces séquences filmées en vidéo sont disponibles sur le Net.
Le « Ch’ti TAIDx » est une approche d’évaluation de la coopération avec les habitants par la mise en récit : cette expérimentation s’inspire des conférences TEDx (Technology, Entertainment and Design) organisées par une fondation à but non lucratif américaine qui a pour but de « diffuser des idées qui méritent de l’être ». À Loos toutefois, les invités ne sont pas des experts, mais des Loossois ayant porté des initiatives exemplaires…
Éviter les récits lisses
Il s’agit donc de donner la parole à des habitants pour qu’ils évoquent leur projet et leur collaboration avec la municipalité. Les Loossois et Loossoises sollicités n'ont pas été choisis dans le but de faire l'éloge de cette collaboration ; la mairie affirme avoir invité des porteurs de projet qui avaient été critiques vis-à-vis de ses actions. « L’idée n'était pas de réaliser une opération de communication mais bien d’évaluer, à travers l'expression de récits alternatifs, la coopération entre citoyens et mairie autour de projets coproduits. Et la coopération, ça frotte ! Ça peut soulever des tensions, c'est rarement lisse », sourit le directeur de cabinet. « Nous voulions éviter deux écueils : celui du récit monolithique qui émane de la mairie ; et celui de ne présenter que des récits lisses, où tout va bien. L’objectif est de ne pas gommer ce qui frotte, c’est important que le récit n’élude pas les problèmes mais qu’ils restent fidèles à la réalité. »
Conduite du changement
Cette approche narrative est un élément essentiel de la méthode de conduite du changement à Loos-en-Gohelle, car c’est un puissant levier d’action sociale. Le récit contribue aussi à générer au sein d’un groupe un sentiment d’appartenance et des références communes autour desquelles se fédérer. Par exemple, la construction collective d’un récit de la résilience appliqué à Loos-en-Gohelle au moment de la fermeture des mines a contribué à changer le regard que les Loossois portaient sur eux-mêmes et à créer des conditions plus propices au rebond espéré. Dans une dimension plus prospective, la mise en récit permet aussi de projeter un scénario d’avenir et de se mettre en mouvement pour le réaliser.
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