Les relations entre les architectes et les acteurs du logement social traversent une phase de tension autour de la question de l'obligation, pour les organismes HLM, de procéder à des concours d'architectes. En jeu : la mise en œuvre de l'article 83 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (loi LCAP).
Celui-ci prévoit que "les maîtres d'ouvrage publics et privés favorisent, pour la passation des marchés de maîtrise d'œuvre ayant pour objet la réalisation d'un ouvrage de bâtiment, l'organisation de concours d'architecture, procédure de mise en concurrence qui participe à la création, à la qualité et à l'innovation architecturales et à l'insertion harmonieuse des constructions dans leur milieu environnant. [...] Les maîtres d'ouvrage soumis à la loi n°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée y recourent pour la passation des marchés de maîtrise d'œuvre ayant pour objet la réalisation d'un ouvrage de bâtiment, dans des conditions fixées par décret".
Les architectes "très vigilants" sur l'application de la loi LCAP
Lors de son discours de vœux le 18 janvier, Catherine Jacquot, présidente du conseil national de l'Ordre des architectes (CNOA), s'est félicitée que la loi LCAP sécurise la commande publique "en consacrant la procédure du concours et en imposant une maîtrise d'œuvre identifiée pour la conception et le suivi des travaux dans les contrats globaux. Un décret d'application est en cours de rédaction, qui définit les missions de la maitrise d'œuvre dans ces contrats". Elle se réjouit également de constater que "les projets de logements sociaux pourraient à nouveau bénéficier du concours d'architecture".
La présidente du conseil de l'Ordre constate cependant que "l'USH s'y oppose avec véhémence. Pourtant, les mises en concurrence avec souvent la primauté du critère prix, organisées par les bailleurs sociaux ont généré un abaissement très important des honoraires de la maîtrise d'œuvre et ne favorisent sûrement pas la qualité des constructions de logements. Même si nous sommes en accord avec l'USH sur bien des objectifs, et en premier lieu sur la nécessité d'une maîtrise d'ouvrage compétente que les Vefa [ventes en l'état futur d'achèvement, ndlr] mettent à mal, le CNOA devra être très vigilant pour que la loi LCAP soit appliquée".
"Faire valoir les particularités des organismes HLM"
De son côté, l'USH ne cache pas ses réserves - pour ne pas dire son hostilité - à la réforme. Dans la partie "Abécédaire" de son rapport d'activité 2015-2016, à l'article "Marchés publics", elle rappelle ainsi que l'ordonnance du 23 juillet 2015 - prise en application des directives européenne du 26 février 2014 - et le décret du 25 mars 2016, qui refondent en un seul texte le droit de la commande publique, constituent "une réforme lourde de conséquences, sur laquelle l'Union sociale pour l'habitat et les fédérations travaillent avec les services juridiques de Bercy pour faire valoir les particularités des organismes HLM". Avec la réforme, ces derniers doivent en effet "respecter un cadre plus contraignant que celui qui résultait de l'ordonnance du 6 juin 2005".
L'USH rappelle au passage que "le décret du 25 mars 2016 prévoit que les OPH, comme les organismes HLM de droit privé, ne sont pas tenus d'organiser un concours pour le choix des maîtres d'œuvre". L'USH se fait plus précise encore en précisant que "bien que partageant de nombreuses dispositions du projet de loi Création, architecture et patrimoine, l'Union sociale pour l'habitat veillera à ce que les dispositions adoptées ne remettent pas en cause les souplesses obtenues dans le cadre de l'ordonnance concernant les marchés publics globaux de performance et le libre choix de la procédure de concours".
A ce jour, il reste toutefois encore une inconnue dans ce débat : la position de la ministre du Logement sur ces deux logiques ouvertement antagonistes. On se souviendra cependant (voir notre article ci-contre du 24 février 2016) que, lors de l'examen du projet de loi LCAP, le gouvernement avait émis un avis défavorable - non suivi par les députés - sur plusieurs amendements parlementaires alignant la passation des marchés des offices publics de l'habitat (OPH) sur les règles applicables aux collectivités territoriales et rappelant ce principe dans la partie législative du Code de la construction et de l'habitation.
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