En annonçant, en janvier 2008, le lancement d'un plan national pour améliorer la sécurité des musées et des monuments (voir notre article ci-contre), Christine Albanel s'était engagée à renforcer les sanctions contre les atteintes au patrimoine. Un décret publié au Journal officiel du 26 décembre concrétise cet engagement en introduisant dans le Code pénal un article R.645-13 instituant une "contravention d'intrusion dans les lieux historiques ou culturels". Celle-ci, qui fait suite à plusieurs affaires de ce type, vise les "fêtards" ou les auteurs de paris stupides qui s'introduisent par jeu ou par défi dans les monuments ou lieux historiques, et non pas les bandes organisées à la recherche d'objets d'art. L'intrusion se caractérise par "le fait de pénétrer ou de se maintenir dans un immeuble classé ou inscrit [...], un musée de France, une bibliothèque ou une médiathèque ouvertes au public, un service d'archives, ou leurs dépendances, appartenant à une personne publique ou à une personne privée assurant une mission d'intérêt général, dont l'accès est interdit ou réglementé de façon apparente [...]". Au-delà du cas des plaisanteries de mauvais goût, l'allusion au fait de se maintenir dans un immeuble classé ou inscrit pourrait aussi viser les occupations d'églises (sous réserve qu'elles n'aient pas été autorisées par "les autorités compétentes ou le propriétaire"). Un alinéa du décret étend également son champ d'application au fait de pénétrer ou de se maintenir "sur un terrain sur lequel se déroulent des opérations archéologiques".
Cette nouvelle infraction, qui s'inspire très directement de l'intrusion dans les bâtiments scolaires (article R.645-12 du Code pénal), fait l'objet de deux sanctions complémentaires : d'une part, "la confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction" ; d'autre part, la réalisation d'un travail d'intérêt général pour une durée comprise entre 20 et 120 heures. La récidive de la contravention est réprimée dans les conditions générales prévues par l'article 132-11 du Code pénal.
La parution de ce décret vient compléter un ensemble de mesures pour renforcer la sécurité du patrimoine. Celui-ci comprend notamment le renforcement des sanctions en cas de vol, destruction ou dégradation d'objets mobiliers classés ou inscrits, bien culturels ou découvertes archéologiques, introduit par l'article 34 de la loi du 15 juillet 2008 relative aux archives (devenu les articles 311-4-2 et 322-3-1, 714-1 et 724-1 du Code pénal). D'autres dispositions, à caractère préventif, ont également été mises en oeuvre, comme le renforcement des systèmes de sécurité dans les musées nationaux et les édifices cultuels, l'instauration d'une liaison directe entre les 86 cathédrales françaises et le commissariat de la ville ou la diffusion d'un guide pratique sur la sécurité du patrimoine. La France s'est également lancée dans une politique ambitieuse de marquage des collections publique et a profité de sa présidence du Conseil européen pour mobiliser les pays de l'Union en vue de renforcer la coopération dans la lutte contre le trafic de biens culturels.

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : décret 2008-1412 du 19 décembre 2008 instituant la contravention d'intrusion dans les lieux historiques ou culturels et modifiant le Code pénal (Journal officiel du 26 décembre 2008).

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